Boarding Gate
Bonjour !
Cet été, à part certains films pourtant très médiatisés, comme Ratatouille par exemple, mais pas forcément mauvais, très peu d'entre eux ont retenu mon attention.
Heureusement, Boarding Gate sort aujourd'hui et vient de réveiller ma curiosité...
Boarding Gate c'est le dernier film d'Olivier Assayyas, (Clean, Demonlover, Les Destinées sentimentales, entre autres...), c'est un thriller de presque deux heures qui nous plongent dans une aventure qui se déroule de Paris à Hong Kong.
Mais trêve de blabla, voici la bande annonce :

Anglophone, truffé de bruits qui sont autant de signes extérieurs de modernité, Boarding Gate n’est donc plus tout à fait un film français, mais certainement pas non plus un produit formaté à l’américaine. Non, aucun studio hollywoodien n’accepterait un scénario assez lâche, qui fait de longues pauses (imposante scène entre les deux personnages principaux, qui mêle rendez-vous d’affaires et rencontre amoureuse) puis s’emballe, se fiche de bâtir sérieusement des personnages pour les traiter presque comme des avatars. Première ou « second life »… ? Formellement, aussi, Boarding Gate ne ressemble qu’à un film d’Assayas : personne d’autre ne filmerait ainsi ce thriller qui court de Paris à Hong-kong, en gros plans, caméra portée, situations saisies à travers des vitres, compositions d’images qui frisent l’abstraction. Le style, ici, est affaire de morale et signale la déshumanisation de la planète.
Boarding Gate est bien le petit frère de Demonlover, l’ambitieuse (et imparfaite) fresque d’espionnage industriel qu’Assayas avait tournée en 2002. Il réactualise quelques figures classiques du film noir – en premier lieu la femme fatale – et les confronte aux mythes d’aujourd’hui, façonnés par la mondialisation. Le business-man, désormais, brasse large : il suffit d’un ordre sur un portable, d’un fax envoyé à l’autre bout du monde, et les grues automates des ports européens débarquent la marchandise, légale ou non.
Le monde change, et pas forcément en bien. Les héros des grands films noirs fuient un passé qui leur colle à la peau. Ici aussi, il est fait référence à un « avant », plus ou moins harmonieux : Sandra, jouée par Asia Argento, était la maîtresse de Miles (le massif Michael Madsen, révélé par Reservoir Dogs), homme d’affaires aux jeux sexuels vraiment particuliers. Ce qui s’est passé entre eux, ce qui lie tous les personnages, antérieurement au récit, est distillé au compte-gouttes, à travers des dialogues allusifs. Chaque conversation est une joute verbale intrigante, et aussi un exercice de style autour de l’idée de pouvoir. Celui ou celle qui croit mener la danse n’est-il pas, sans le savoir, manipulé ?

Bientôt, Sandra est piégée, en fuite. Dès qu’elle débarque en Asie, Boarding Gate troque le vide glacé d’un Occident en perdition pour le grouillement d’une métropole. Plus de faux-semblants : on est dans la réalité des corps, multipliés comme à l’infini, il s’agit juste de préserver le sien, de sauver sa peau. Au cours d’une poursuite haletante, Asia Argento, actrice qui a pu agacer dans sa posture obligée de séductrice provocante, est alors plus nue que nue : sans maquillage, sobrement vêtue, elle gagne en humanité ce qu’elle perd en artifice. Ce qui arrive à l’actrice correspond à la course de son personnage : il lui faut une nouvelle identité, une renaissance loin de ceux qu’elle a trahis (ou qui l’ont trahie). Le désarroi qu’Assayas saisit alors sur le visage métamorphosé d’Asia, la bien prénommée, est l’une des plus belles visions que l’on puisse goûter cet été sur un écran de cinéma.
Genre : Thriller
Nationalité : Français
Durée : 1 h 45 min
Réalisation : Olivier Assayas
Avec : Asia Argento, Michael Madsen, Carl Ng, Kelly Lin
Séduit ?